Friday, August 28, 2009

Gerontophobie

Gerontophobie : peur des personnes âgées.

A six ans, Cindy était boulimique, à sept anorexique, à dix de nouveau boulimique. A douze ans, elle faisait tomber tous les garçons de quinze ans. A quinze ans, elle faisait tomber tous les garçons. Francois, mariés, deux enfants, aurait pu avoir de sérieux problèmes si Cindy était du genre à faire chanter les adultes. Mais non. Ce qui l'intéressait depuis le plus jeune age, c'était son tableau de chasse. Un point c'est tout.

Elle n'avait pas connu ses parents. Son père était parti avant sa naissance et sa mère avait eu la lacheté de mourir d'un accident de voiture alors qu'elle n'avait que deux ans. Ce sont donc ses grand-parents qui l'éduquérent, Renée et Charles, avec les avantages et les inconvénients que cela comporte.

Parmi les inconvénients non négligeables, Cindy devait reconnaitre que ses grand-parents étaient foncièrement méchants et qu'ils lui firent comprendre qu'elle était un poids supplémentaire dans leur foyer plutot qu'une bénédiction. Parmi les maigres avantages, faire le mur avec des personnes céniles pour veiller sur elle était chose aisée.

Cindy n'aurait su dire si son plus beau jour était celui de la mort de Charles ou celui de la mort de Renée deux ans après. Mais quelque part, elle leur était redevable. Ils lui avaient montré l'exemple de tout ce qu'elle ne souhaitait jamais devenir. A la mort de Renée, elle se fit la promesse de ne jamais vieillir.

C'est lors d'une chasse anodine qu'elle perdit son oeil gauche. La cible, un beau male d'une trentaine d'années, semblait innocente et peu farouche. Elle s'avéra ivre et violente. Le coup partit tout seul. Sans qu'elle ne le voit venir, elle recut un coup de touillette de cocktail en plein dans la cornée.

Avec son bandeau de pirate en travers du visage, elle devint irresistible et fit des ravages encore plus sanglants parmi la faune masculine. Son apétit d'hommes qu'on consomme et qu'on jette ne connaissait plus de limite. Ses amies l'appelaient Carnivora.

Sa gérontophobie allait croissante au fur et à mesure qu'elle vieillissait. Ne pas finir comme ca. Non. Par pitié. A 35 ans, le choix se fit entre les crèmes anti-rides et le suicide. A quarante, la chirurgie ou le suicide. A 45 ans, par fatigue, conviction et manque de choix, elle passa à l'acte. Elle manquait d'entrainement. Elle échoua. De peu.

Le Dr Pacheff fit des miracles. Il parvint à sauver Cindy d'une mort qui lui tendait les bras. Mais il ne put rien pour lui faire recouvrir sa motricité. Tétraplégique, Cindy passa le reste de sa vie allitée, à se voir enlaidir jour après jour. Et il ne lui restait plus qu'un oeil pour pleurer, s'ouvrir et se refermer sur un cauchemar de trente ans.

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