Sunday, August 30, 2009

Triskaïdékaphobie

Triskaïdékaphobie : peur du chiffre treize

Marie avait toujours voulu avoir un enfant, mais elle etait genophobique. Ce qui ne rendait pas la chose facile et enervait profondement son mari, Joseph. Aussi, quand Marie tomba enceinte, Joseph etait partage entre la joie d'etre bientot pere et l'inquietude de se savoir cocu. Pour conjurer le sort, il fit venir un boeuf lors de l'accouchement, afin de se sentir un peu moins seul au pays des cornus.

Jésus vit le jour un 25 decembre. Il pesait 4,2 kilos. Un bon gros bébé, avec ses petits doigts tout potelés. Dès la naissance, il fut pourri-gaté. Trois tetes couronnées aux noms improbables que Joseph n'avait jamais vues auparavant vinrent déposer devant le berceau de son fils des tonnes de cadeaux. Il était persuadé que son fils tournerait mal. Il ne se trompait pas. Et les questions à l'encontre de sa femme se bousculaient dans sa tete. Mais par fierté, il préféra les garder pour lui.

Jésus grandit. Il était très discipliné. Il tenait cela de sa mère. Il aimait les choses bien rangées, bien ordonnées. Mais par dessus tout, il avait un ego démesuré. Il adorait etre le centre de l'attention des gens autour de lui. Et quand par malheur quelque chose ne se passait pas comme prévu, il savait attirer l'attention en changeant l'eau en vin, en marchant sur l'eau ou si besoin était, en demandant à son père qu'il intervienne. Pas Joseph, mais l'Autre, son père biologique. Jusqu'à ses 33 ans, il vécut une vie heureuse, pleine de rencontres enrichissantes.

Comme Jésus était plutot sympathique, il avait plein d'amis. Et il aimait bien organiser un petit diner de temps en temps avec eux pour parler des derniers ragots en général et de Margot en particulier. C'est à dire qu'il avait un faible pour Margot. Hélàs, il n'était pas le seul. Il était sorti avec elle, mais à force de mensonges, elle s'était mise à ne plus croire en lui et était partie avec son meilleur ami, Judas.

Son dernier diner eu lieu dans son appartement, près de la Seine. Ils étaient une douzaine, parmi lesquels Paul, Pierre ou Thomas. Jésus était loin de se douter que ce serait son dernier diner. L'ambiance battait son plein, le vin coulait à flot quand on sonna à la porte. Surpris, Jésus prit congé de ses invités et alla ouvrir. Judas se tenait sur le pas de la porte. Cela faisait deux ans qu'ils ne s'étaient pas vus, pas parlé. Jésus éprouvait toujours une forte jalousie mélée de haine à l'égard de son ancien meilleur ami.

- Tu ne m'invites pas à entrer ?
- Non. Je suis avec des amis. Des vrais,
- Allez, fais pas l'enfant...

Judas s'avanca et le prit dans ses bras pour lui faire une accolade. Jésus eut un mouvement de recul et tint Judas à bout de bras.

- Que veux-tu ?
- Elle est ici ?
- Qui ca ? Margot ? Tiens, c'est drole, ca. Tu l'as perdue ?
- On s'est disputé...
- Tu ne l'as jamais méritée...
- Elle est là ou pas ?
- Rentre chez toi...
- Ne m'oblige pas, Jésus...
- Quoi ? Qu'est ce que tu vas me faire ? Tu es chez moi, ici...

A ce moment, Judas sorti son portable et composa un numéro.

- Allo ? Commissaire Pilate ? Il est à vous.

Jésus saisit le téléphone des mains de Judas et le jeta par la cage d'escalier.

- Qu'est ce que c'est que ces conneries ?
- Tu crois que je connais pas tes petites magouilles ? Ta vente de pains au marché noir ? Ta contrefaçon viticole ? Ton traffic de croix en bois ? Et bien maintenant, les flics aussi sont au courant !
- Salaud. Dégage ! Je veux plus te voir.

Deux minutes plus tard, les sirènes, les flics, la descente, le commissaire Romain Pilate, les menottes. Embarqué au poste, Jésus nia tout. Les policiers le tabassèrent dans les règles de l'art. Avec le bottin, pour pas laisser de traces. Ils frappèrent un peu fort. Jésus avait un coeur faible. Il s'écroula trop tot. On ne put le ranimer.

Quand il revint à la vie une semaine plus tard, il ne voulut plus jamais entendre parler de Judas. Et il devint extrèmement superstitieux - on le serait à moins. Judas était la 13e personne à passer le pas de sa porte le soir du diner de la Seine. Le chiffre 13 était donc synonyme de grand malheur et pour les quelques jours qui lui restaient à vivre dans cette seconde vie, il craignit le chiffre 13 comme la Peste.

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